En 1997, l’Europe des Quinze faisait du droit d’asile une priorité de sa politique d’immigration. Plus de dix ans après, Nulle part terre promise d’Emmanuel Finkiel tire le bilan de ce qui pourrait apparaître aujourd’hui comme un vœu pieux. En suivant trois trajectoires – un cadre supérieur encadrant la délocalisation d’une usine française en Hongrie, une étudiante filmant des SDF dans l’Europe de l’Est, et un groupe d’immigrés kurdes voulant rallier la Grande-Bretagne –, le réalisateur ausculte les difficultés sur lesquelles l’Europe du xxie siècle achoppe. Sans cesse, le cinéaste, dont on reconnaît la patte documentaire, multiplie les face-à-face entre ses personnages et confronte ainsi l’Ouest à l’Est où le film se stabilise (l’essentiel du récit se passe à Budapest). C’est dans cette aire européenne slave souvent accusée de dumping économique, qu’E. Finkiel aborde les migrations et les chocs sociaux que les disparités économiques rendent inévitables. La poésie de Nulle part terre promise tient à la poignante humanité dont il émaille ce constat : dans une gare à Paris, l’échange de regards entre un petit Kurde immigré lorgnant timidement sur les Nike neuves d’un jeune Français…
Marc Olano