À la suite des Printemps arabes et de la guerre en Syrie, l’Europe a reçu un nombre record de demandes d’asile depuis la Seconde Guerre mondiale. Ce nombre a culminé en 2015 où plus d’un million de demandes ont été enregistrées. Les images des bateaux surchargés et des colonnes de personnes passant les frontières ont rapidement transformé ces évènements dramatiques en ce qu’il est convenu de considérer depuis comme une « crise migratoire ». L’examen dépassionné des faits pourrait néanmoins conduire l’observateur rationnel à être quelque peu étonné d’une telle emphase : qu’un continent de 500 millions d’habitants produisant un quart de la richesse mondiale puisse se sentir submergé est a priori déroutant. Que devrait-on dire au Liban ou en Jordanie, où les flux des réfugiés Syriens ont représenté respectivement le quart et la moitié de la population ? C’est justement cette dramatisation systématique de tout ce qui a trait aux phénomènes migratoires qui est intéressante, car elle révèle les craintes de certains habitants des pays riches et permet de réfléchir aux moyens de les surmonter.
Dans le cas de la France, 71 241 demandes d’asile ont été déposées à l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) en 2015 et 87 721 en 2016, soit l’équivalent de 0,13 % de la population du pays. Ce flux est supérieur à ce qu’il était au début des années 2000 marquées par les conflits en Algérie, en Tchétchénie et en ex-Yougoslavie, sans être toutefois « dramatiquement » plus élevé. À titre d’exemple, 58 319 demandes avaient été déposées en 2004. De façon intéressante, lorsque les demandes en France sont rapportées à l’ensemble des demandes adressées aux 27 pays de l’Union européenne, la diminution est frappante : la part des demandes déposées en France était de 7 % en 2016 contre plus de 21 % en 2004.