Plagier... en toute bonne foi

Périodiquement, des accusations de plagiat secouent le monde des lettres. Appropriation cynique de l'œuvre d'autrui ? Plus probablement, le plagiaire est de bonne foi ; c'est sa mémoire qui déforme les faits.

L'expérience menée par trois chercheurs britanniques permet de comprendre pourquoi et comment. Des étudiants, par groupes de quatre, sont invités à trouver des usages non classiques à des objets courants (brique, chaussure...) ; chacun communique ses propositions à son groupe.

Puis vient la phase d'« élaboration ». Les membres de chaque groupe sont invités soit à se représenter visuellement les idées données, soit à trouver trois façons d'améliorer chaque idée émise par un membre de son groupe, soit à réécouter la liste des idées, soit à repartir sans instructions d'élaboration (ces groupes-là servent de contrôle). Une semaine plus tard, tous sont reconvoqués, et chacun est invité à indiquer quelles sont les idées qu'il se rappelle comme venant de lui.

Au total, 79 % d'entre eux s'attribuent à tort au moins une idée émise par quelqu'un d'autre, et ces plagiaires sont nettement plus nombreux parmi ceux qui ont travaillé sur les idées d'autrui que dans les autres groupes. Selon les auteurs, cela tient au fait que, pour améliorer l'idée d'autrui, chacun s'inspire de ses propres goûts, de ses souvenirs. Ainsi la différence entre « mon idée » et « son idée » s'amenuise, au point que les deux en viennent à se confondre. Les créateurs, qui étudient les oeuvres de ceux qui opèrent dans le même domaine qu'eux, courent donc en effet le risque de les plagier de bonne foi.

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