Éthologie et peuples, voici deux mots que l'on n'a guère l'habitude de voir ensemble : l'éthologie, faut-il le rappeler, est l'étude des fondements biologiques du comportement animal. Quant à la notion de peuple, elle désigne des groupes humains formant des entités culturelles et historiques. Pourtant, c'est bien à une « éthologie des peuples » que les participants à un colloque de Cerisy se sont employés de réfléchir en août dernier. L'idée avait été avancée deux ans plus tôt par un ancien conseiller de la Banque mondiale, Jean-Eric Aubert, lors d'un précédent colloque cerisien 1. Parmi les participants, le philosophe et éthologue Dominique Lestel avait accepté de relever le défi.
Les réticences à l'égard d'une telle éthologie ne manquent pas, à commencer chez les spécialistes du comportement animal eux-mêmes : « Les éthologues, explique D. Lestel, sont des biologistes qui s'intéressent aux organismes vivants ; pour eux, une éthologie des peuples ne peut être qu'un contresens. » Un autre motif de réticence, sinon de résistance, tient à la défiance qu'inspirerait, en France plus qu'ailleurs, l'approche des phénomènes humains sous l'angle de la biologie.