Depuis une vingtaine d'années, un certain nombre de pays développés comme les Etats-Unis et le Royaume-Uni ont connu un creusement de l'écart des revenus entre riches et pauvres. D'autres, comme la Finlande, sont restés stables. Quels sont les facteurs responsables de ces différentes évolutions ? Selon Björn Gustafsson et Mats Johansson, enseignants à l'université de Göteborg, cette question ne peut recevoir de réponse que par l'étude comparée de la variation des inégalités de revenus sur une période de temps suffisamment longue. La littérature existant sur le sujet incrimine, tour à tour, le niveau d'industrialisation, les effets du commerce international, le taux de chômage, l'inflation, le niveau de démocratie politique, l'importance du secteur public et la démographie. Gustafsson et Johansson ont donc repris l'ensemble de ces facteurs et les ont confrontés à l'évolution des inégalités de revenus dans 16 pays de l'OCDE, sur une période de près de trente ans (1966-1994). Leur analyse multifactorielle, passablement sophistiquée, les amène à retenir quatre facteurs importants : la diminution de la part de l'activité industrielle, l'augmentation des importations (mais ce facteur ne vaut que dans les pays extra-européens), la régression du secteur public et certains phénomènes démographiques, comme l'augmentation de la population des moins de 15 ans. Tous ces paramètres sont corrélés à l'accroissement des inégalités de revenus. En revanche, ni le taux de chômage, ni l'inflation, ni la féminisation de l'emploi ne semblent avoir d'incidence notable. Quant à la démocratie politique, il leur semble impossible de dire si elle intervient comme cause ou comme conséquence de la variation des écarts de conditions. On retiendra que de telles conclusions n'incitent pas à penser que l'application de recettes libérales puisse mener, même à terme, à une réduction des inégalités.
Références
B. Gustafsson et M. Johansson, « In search of smoking guns: what makes income inequality vary over time in different countries? », American Sociological Review, n° 4, vol. 64, 1999.