Pris les doigts dans le genre...

Il y a déjà plusieurs semaines, Claudine Moïse, linguiste et enseignante à l’université de Grenoble-Alpes, exprimait dans un message sa franche consternation devant le fait que le dossier de notre mensuel « 25 ans » (n° 277, janvier 2016) ne comportait que six signatures féminines contre vingt signatures masculines. Elle nous faisait savoir gentiment mais fermement que la parité des sexes n’est pas qu’un lointain idéal, mais peut se pratiquer hic et nunc. « Pourquoi, demandait-elle, ne pas poser l’équité homme/femme (des signatures) comme principe de votre journal ? »

J’en ai été un peu perplexe. Je tenais pour acquis que s’il y avait un « principe » à notre magazine, c’était d’abord de choisir les auteurs en fonction de leur spécialité et des travaux qu’ils avaient publiés, puis de considérer leur personne. Il m’a semblé qu’inverser les priorités constituerait une démarche plus politique que scientifique et je l’ai écrit à notre correspondante. Elle ne le nie pas, et précise que la recherche de l’équité ne consiste pas à se caler sur la répartition existante des deux sexes par profession, degré hiérarchique ou discipline, mais de « favoriser leur juste répartition et égale visibilité dans les espaces de pouvoir ». Visibilité égale, en l’occurrence, signifie égalité arithmétique. Claudine Moïse prend en exemple les jurys universitaires de thèses, dont il est prévu qu’à partir du 1er septembre 2016, ils devront impérativement comporter un nombre « équilibré » d’hommes et de femmes. Très bien, voilà qui est juste, se dit-on. Oui mais, révèle notre correspondante, les sciences du langage étant d’ores et déjà une discipline fortement féminisée, c’est plutôt une femme qu’il lui incombera de faire remplacer par un homme que l’inverse…