Psychiatrie et migrations

Thierry Baubet, Marie-Rose Moro (dirs), Masson, 2003, 236 p., 37 €.

Migrants mais aussi personnes déplacées, réfugiées... Que peut faire la psychiatrie pour venir en aide à des patients ancrés dans d'autres cultures ? Désarmée, elle doit développer de nouvelles compétences et méthodes, car la question de la différence culturelle est un paramètre indispensable tant pour le diagnostic psychiatrique que pour le soin. La psychiatrie culturelle, née dans les années70, s'inscrit dans cette perspective, en visant à « modifier la relation médecin-malade, améliorer la qualité des soins, sans rejeter le modèle biomédical mais en relativisant les visées universalisantes de celui-ci ». Ce livre propose un tour d'horizon des principales problématiques à considérer - les représentations culturelles de la maladie, les syndromes psychiatriques spécifiques à certaines cultures, la recherche, etc.

Cet ouvrage aborde notamment la question du diagnostic, celui-ci soulevant bien des difficultés et réclamant de nombreuses adaptations de la part du praticien. Ignorant des us et coutumes, il risque d'attribuer une signification psychopathologique à des éléments - mimiques, expressions des affects, gestes - qui n'en sont pas. Ainsi, les enfants d'origine africaine évitent volontairement de croiser le regard du praticien, qui pourrait interpréter cette attitude comme un signe d'inhibition, de retrait relationnel là où il ne faut y voir qu'une marque culturelle de respect envers l'adulte. Le recours à un interprète facilite également l'expression, dans sa langue d'origine, des souffrances vécues par le patient.

On le devine, la psychiatrie culturelle doit faire face à de sérieux défis pour devenir une pratique plus large que celle apportée, en France, par les consultations d'ethnopsychanalyse.