Depuis l’ère Bush, la torture a entaché durablement l’image de l’administration américaine. Aujourd’hui, au tour des psychologues d’être sur la sellette ! En effet, le 13 octobre 2015, l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU) a assigné en justice deux psychologues, James Elmer Mitchell et Bruce Jessen, à la cour fédérale de l’État de Washington. L’association représente trois anciens prisonniers de la base américaine de Guantánamo, Suleiman Abdullah Salim, Mohamed Ahmed Ben Soud et Gul Rahman, ce dernier décédé, les deux autres aujourd’hui en liberté. Les deux psychologues affirment depuis des années que leur programme d’interrogation « renforcé » était « fondé scientifiquement » et « le moins pire des choix pour sauver des vies américaines ». Mais, pour l’association, celui-ci était illégal et barbare. Ils reprochent aux deux hommes d’avoir violé le code éthique de la profession, puisque la psychologie vise en principe à guérir et non à faire du mal à autrui.
L’accusation invoque la loi sur les délits civils contre les étrangers (Alien Tort Statutes), qui autorise les poursuites en cas de violation des droits humains fondamentaux. Pour appuyer ses griefs, l’ACLU se fonde sur les témoignages des trois anciens détenus et sur un rapport parlementaire récent. Celui-ci établit que les deux psychologues ont supervisé l’ensemble du programme, quand ils ne le mettaient pas eux-mêmes directement en pratique. La « méthode », mise en œuvre à partir de 2002, consistait à projeter les prisonniers contre un mur, à les enfermer dans des boîtes en forme de cercueil, à les exposer à des températures extrêmes ou à une musique excessivement forte, à les noyer, à les enchaîner dans des positions inconfortables de façon à les maintenir éveillés pendant plusieurs jours, ou encore à leur injecter de la nourriture par l’anus.