La première utilisation du mot « psychothérapie » date de 1872, sous la plume de l’aliéniste britannique Daniel Hack Tuke (1827-1895). Dans Illustrations de l’influence de l’esprit sur le corps dans la santé et la maladie,il plaide pour une étude scientifique du pouvoir thérapeutique de « l’imagination », que les médecins, selon lui, connaissent et utilisent depuis longtemps. De fait, tout en innovant sur le plan linguistique, Tuke se relie à une histoire médicale remontant à la deuxième moitié du XVIIIe siècle : celle de la prise en charge de l’aliénation mentale sous la forme du « traitement moral », et du constat des effets de l’esprit sur le corps. Souvent vu comme l’une des origines de la psychothérapie, ce traitement moral désigne une prise en charge par les vertus de la parole persuasive plutôt que par la contention. Toutefois, dans la réalité, le rapport entre nombre de soignants et de soignés limite sa mise en œuvre au cours du XIXe siècle.
Raisonneurs contre hypnotiseurs
Si la psychothérapie se confond un temps avec la pratique de l’hypnose* et de la suggestion, d’autres formes, présentées comme rationnelles, lui sont rapidement opposées, tant et si bien qu’on peut parler autour de 1900 d’une querelle entre « médecins-hypnotiseurs » et « médecins-raisonneurs ». Ces divergences n’entravent nullement la diffusion de la psychothérapie dans l’Europe entière et en Amérique du Nord, un succès qui doit sans doute beaucoup à la diversité des procédures mises en œuvre. Apparaissent des revues spécialisées et des sociétés savantes, et la psychothérapie figure régulièrement aux côtés des traitements somatiques dans l’offre des cliniques privées destinées aux « nerveux » issus des classes aisées.