Qu'est-ce que le cosmopolitisme ?

Ulrich Beck, Aubier, 2006, 378 p., 25 €.

L'auteur de La Société du risque et de Pouvoir et contre-pouvoir à l'heure de la mondialisation s'attaque ici à un concept qu'il avait déjà évoqué mais qui lui tient à cœur : le cosmopolitisme. Cette antique notion, ravivée par les Lumières, mérite selon lui d'être repensée. Au cosmopolitisme philosophique, fort de la grande idée fraternelle du citoyen du monde, Ulrich Beck oppose un cosmopolitisme réaliste, sociologique. Le cosmopolitisme n'est pas un choix, un projet, il est une réalité. « L'optique nationale, la grammaire nationale sont désormais fausses : elles sont aveugles au fait que l'action politique, économique et culturelle, avec son cortège de conséquences (connues et non connues), ignore les frontières. » La cosmopolitisation du monde n'est pas le fruit d'un complot capitaliste ou de l'impérialisme américain. Elle naît de la prise de conscience d'une réelle interdépendance planétaire. Les dangers écologiques, l'interdépendance économique ou le terrorisme ont éveillé une opinion publique mondiale consciente qu'il faut dépasser la vision nationale.

U. Beck s'attache donc à montrer comment la « cosmopolitisation » travaille la société mondiale. Les diasporas en sont un bon exemple : dans les pays où ils vivent, leurs membres sont à la fois des nationaux et des étrangers. Et partout des transnationalisations sont à l'oeuvre qui obligent à dépasser les frontières nationales.

Il ne s'agit pas pour autant de plaider en faveur du multiculturalisme. Son principal tort, pour U. Beck, est de penser les différences culturelles certes, mais toujours dans l'espace national. En ce sens, il est insuffisant pour comprendre la complexité du réel. Si les Etats-Unis constituent une nation multiculturelle, l'Europe pourrait, elle, adopter une optique cosmopolitique. C'est d'ailleurs selon U. Beck sa seule chance : « L'Europe n'existera donc que comme une unité cosmopolitique fondée sur la reconnaissance et la réconciliation de nombreuses histoires nationales ou régionales ? ou bien elle n'existera pas. »