Quel est l’impact du discours du maître sur les performances des petits élèves ? Cette question a fait l’objet de plusieurs recherches auprès d’enfants de 4 ans, scolarisés dans des classes maternelles. Dans l’une d’entre elles, les chercheurs se sont intéressés aux notions mathématiques. Ils ont décortiqué une heure d’intervention (sans que les enseignants soient au courant) de 26 instituteurs auprès de leur classe, en relevant tous les termes spécifiquement mathématiques : « Attendez qu’il ait compté un, deux, trois », ou « Oui, vous pouvez m’aider tous les trois ».
L’étude met en évidence une différence sensible entre les maîtres puisque le nombre de termes mathématiques employés en une heure varie de 1 à 104 (avec une moyenne de 28). Et cette différence se retrouve chez les élèves : ceux qui ont fait, en six mois, le plus de progrès dans la connaissance des maths sont ceux dont le maître « parle maths » le plus souvent, indépendamment de ses autres qualités pédagogiques et indépendamment aussi du niveau socio-économique des enfants.
La seconde expérimentation portait sur la syntaxe grammaticale et partait d’un constat : les enfants accèdent bien plus tard à la maîtrise de la forme passive qu’à celle de la forme active des phrases. Les auteurs ont voulu, là, tester une hypothèse : peut-on accélérer l’apprentissage de cette construction en lisant simplement aux enfants des histoires truffées de verbes au passif ? La réponse est oui : lorsqu’on interroge tous les enfants quelques jours après les sessions de lecture, ceux qui ont entendu dix petites histoires remplies de phrases comme « la fleur a été mangée par le lapin » font moins d’erreurs dans la reconnaissance des formes passives, et l’emploient plus spontanément que ceux qui ont entendu les mêmes histoires, avec des « le lapin a mangé la fleur ». Ce résultat semble intéressant pour les maîtres de maternelle, font remarquer les auteurs, car il ne se limite pas à l’apprentissage du passif : on peut espérer que des histoires truffées de « le lapin qui a mangé la fleur était blanc » familiariseront de même les enfants avec les propositions subordonnées.
Marc Olano