Au 19e siècle, dans un contexte de renouveau religieux et de montée des nationalismes et des impérialismes, l’Occident réinvestit la Terre sainte.
Le cas de la France est emblématique, notamment à Jérusalem. Depuis les accords signés en 1536 entre Soliman le Magnifique et François 1er, la France avait la primauté en matière de protection des catholiques d’Orient. Au 19e siècle, elle renforce les liens noués avec ces clientèles traditionnelles, ancrant leur dépendance à son égard. On assiste à partir de 1850 au développement d’institutions catholiques caritatives (écoles, écoles professionnelles, orphelinats, hôpitaux, hospices) et autres (hospices pour pèlerins, institutions scientifiques, etc.), en parfaite entente entre les religieux et les autorités françaises. Et cela même au moment du plus fort de la crise anticléricale : en certains endroits, on constate une assimilation entre la France et le catholicisme (les « domaines nationaux », véritables enclaves françaises). À sa façon, l’anticléricalisme renforce d’ailleurs la présence française en Orient, en Palestine en particulier, avec l’exil des congrégations. Cette densification du réseau montre que la France semble « de retour » en Terre sainte. L’appropriation est mentale (pèlerinages, littérature, périodiques) ; elle est aussi matérielle (construction de vastes édifices), et semble préfigurer une appropriation politique.
Compétition internationale
Mais la France n’est pas la seule. Dans le contexte des rivalités entre les grandes puissances une compétition internationale s’installe. La Russie agit en direction des orthodoxes, l’Autriche-Hongrie en direction des Latins (ou catholiques) en concurrence avec l’Italie et l’Espagne, l’Allemagne en direction des catholiques ou des protestants, et enfin la Grande-Bretagne en direction des protestants. Les États-Unis ne sont pas en reste : les premiers missionnaires protestants américains arrivent au Proche-Orient en 1819. Des organes sont mis en place pour coordonner l’action et pérenniser le lien avec les clientèles respectives : pour ne citer que le cas français, l’Œuvre des écoles d’Orient (1856) dirigée par l’abbé et futur cardinal Lavigerie, collecte des fonds pour venir en aide aux établissements catholiques français qui assistent les chrétiens orientaux, en particulier ceux unis à Rome (maronites du Liban, melkites, syriens catholiques…).