Rapport Thélot : de la recherche à la politique

Censé émaner du « grand débat national sur l'avenir de l'école » qui s'est déroulé en 2004, le rapport Thélot, destiné à préparer la nouvelle loi d'orientation de 2005, a aussi pris en compte certaines avancées de la recherche en éducation.

Alain Finkielkraut et Élisabeth Altschull ont bruyamment critiqué les propositions du rapport publié par la Commission du débat national sur l'école présidée par Claude Thélot, dont ils étaient pourtant initialement membres. « Je savais que ce grand débat ne pouvait que déboucher sur une confirmation du discours dominant sur l'école », a affirmé A. Finkielkraut. On peut ne voir dans cet éclat médiatique qu'un épisode supplémentaire de la polémique entre « pédagogues » et « républicains ». Mais on peut aussi y lire la résurgence d'une autre question sensible bien que moins médiatisée, celle des relations entre la recherche en éducation et le pouvoir politique. En effet, dans un livre très critique mais argumenté, Une sociologie d'Etat. L'école et ses experts en France (Liber/Raison d'agir, 2003), le sociologue Franck Poupeau avait dénoncé les stratégies de certains experts et universitaires spécialisés dans la recherche en éducation. « Tout se passe comme si les experts en éducation, écrit-il, étaient parvenus à se créer une position intermédiaire entre le monde académique, auquel ils ont peu accès, et le monde éducatif, dans lequel ils ne veulent pas tomber, jouant sans cesse d'un registre pour s'imposer dans l'autre. » De fait, il est facile de reconnaître dans les propositions de la Commission Thélot des orientations exprimées depuis longtemps par certains experts et universitaires membres de la Commission ou auditionnés par elle. Ainsi, la définition d'un « socle commun de connaissance », un des axes majeurs du rapport, est depuis plusieurs années le cheval de bataille de l'historien Claude Lelièvre, membre de la Commission. Le renforcement de la politique des zones d'éducation prioritaires (Zep), également prôné par le rapport, est un principe auquel le sociologue François Dubet, autre membre de la Commission, et C. Thélot lui-même ont manifesté depuis longtemps leur attachement. Enfin, la demande de systématisation de la politique d'évaluation des établissements et des enseignants renvoie encore à l'action de C. Thélot, qui a été un des principaux initiateurs de cette démarche au ministère.