À propos de notre Grand Dossier n° 53, intitulé « Soigner, une science humaine » (décembre 2018/janvier-février 2019), la docteur Michèle Mazeau, neuropsychologue, nous a adressé une vive critique.
Je vous écris au sujet de l’article « Tout est médical ! », signé de Christelle Rabier.
Je déplore en effet que, concernant le TDA/H (trouble déficitaire de l’attention, avec ou sans hyperactivité) et son traitement médicamenteux, cette historienne diffuse des croyances mal fondées, et se fasse l’écho d’amalgames nocifs entre des pathologies neurologiques avérées et des faits de société discutables, amalgames par ailleurs largement exploités sur le Net. Le chapeau de l’article (« Des médicaments pour calmer les enfants agités ») surfe sur une vague médiatique pernicieuse, en particulier par la mise en lien avec « faire pousser les cheveux » (!), suggérant ainsi qu’il s’agit de purs caprices, d’exigences parentales et sociétales de normalisation de l’enfant turbulent. En réalité, le traitement en question n’est pas du tout un calmant, information qui est d’ailleurs mentionnée dans le corps de l’article.
Je suppose que C. Rabier n’a jamais rencontré d’enfant présentant ce trouble neurologique, ce qui est naturel au vu de sa profession d’historienne, et donc qu’elle ne sait rien de la souffrance de ces enfants, de leurs familles, ni des conséquences délétères graves à moyen et court terme que ce trouble du développement neurologique induit dans tous les aspects de la vie de l’enfant, puis du jeune, puis de l’adulte.
Si, au lieu de céder à la facilité d’idées véhiculées par des sources douteuses, l’auteure avait consulté les travaux scientifiques sur le sujet 1, elle aurait constaté qu’au contraire, ce sont les jeunes qui ne sont pas traités qui ont un pronostic très sombre, dont le traitement les protégerait en grande partie. En effet, nous ne savons malheureusement pas guérir ce trouble, mais comme dans de nombreuses autres pathologies, de l’hypertension au diabète en passant par les cancers, nous savons en limiter les conséquences.