En moyenne un juif, un confucianiste ou un protestant produit 3 fois plus qu'un catholique, 8 fois plus qu'un orthodoxe, 14 fois plus qu'un musulman et 20 à 30 fois plus qu'un bouddhiste, un animiste ou un hindou. Tel est le surprenant résultat auquel sont parvenus les deux auteurs en se livrant à des calculs en apparence savants, en fait très simples : une fois identifiée la religion dominante dans quelque 150 pays de plus d'un million d'habitants, ils ont ensuite évalué le PNBH, soit la richesse moyenne produite par habitant au cours d'une année. Quelle que soit l'ère géograhique considérée, la même hiérarchie se retrouve, à quelques rares exceptions près : en Europe occidentale, le PNBH des pays à dominante protestante est en moyenne supérieur à celui des pays catholiques ; dans l'ex-URSS, les républiques musulmanes arrivent derrière les pays orthodoxes. Quant aux pays pauvres d'Afrique subsaharienne, ils sont presque tous à dominante animiste.
La religion influencerait-elle donc le développement ? La relation n'est pas aussi simple et c'est tout le mérite des auteurs que de la restituer dans toute sa complexité. D'abord, en rappelant les multiples dimensions (économique, mais aussi politique, sociale...) du développement. Ensuite, en prenant en compte les autres facteurs susceptibles de peser sur ce dernier : le système politique, la démographie sans oublier... le climat ! Enfin (et surtout ?) en distinguant les différentes modalités par lesquelles s'exerce peu ou prou l'influence de la religion : les préceptes à caractère économique (comme par exemple l'interdit du prêt); les pratiques affectant les comportements démographiques ou de consommation (le jeûne); les concepts « qui forgent la mentalité profonde de l'individu » et, enfin, les effets sur l'inconscient collectif.
Du fait de l'effet combiné de ces modalités, l'influence de la religion sur le développement n'apparaît en définitive ni directe ni univoque : dans certains cas, la religion constitue globalement un obstacle au développement, dans d'autres cas, un vecteur positif. De toutes les religions, c'est le protestantisme qui réunirait le plus de facteurs favorables au développement, et l'animisme le plus de facteurs négatifs.
Certes, ces hypothèses simplifiées à l'extrême dans un souci louable de vulgarisation pourront surprendre. Reste une analyse richement documentée qui a de surcroît le mérite de raviver une problématique explorée par Max Weber et abandonnée depuis.