Il y a une vingtaine d’années émergeait le concept de « réserve cognitive » : toutes les activités que nous entreprenons dans notre vie contribueraient à nous doter d’une sorte de réserve mentale nous permettant de compenser les effets délétères liés au vieillissement tant normal que pathologique. Aujourd’hui, la littérature scientifique foisonne d’articles mettant en évidence le rôle protecteur de différents facteurs censés intervenir de façon cruciale dans la « construction » de la réserve cognitive : posséder un niveau scolaire élevé, avoir un style de vie actif, exercer une profession d’une certaine complexité, s’adonner à des loisirs culturellement enrichissants, faire de l’exercice, avoir un réseau social étoffé, parler plusieurs langues…
De nombreux travaux montrent que le taux d’activité physique augmente la longévité, tant dans le vieillissement normal que dans la maladie d’Alzheimer. Ainsi, une étude de Nikolaos Scarmeas, publiée en 2001 dans le magazine Neurology, faisait apparaître que la courbe de survie de patients Alzheimer serait sensiblement meilleure chez ceux qui pratiquent quelques activités physiques, et plus encore chez ceux qui font beaucoup d’exercice. Dans un registre très différent, on démontrerait moins de patients Alzheimer chez les personnes qui assistent régulièrement à un office religieux que dans l’ensemble de la population.
Ces deux exemples suffisent à amorcer la réflexion. « Face à de tels résultats, il est difficile de faire la part des choses entre l’apport de l’activité en tant que telle et celui de ses effets collatéraux positifs, indique le professeur Stéphane Adam, responsable de l’unité de psychologie de la sénescence à l’Université de Liège (ULiège). Dans le cas des activités physiques, faut-il chercher la cause dans des paramètres biologiques, telle une meilleure oxygénation du cerveau, ou dans le fait que les individus concernés sortent de chez eux, sont confrontés à la vie extérieure, nouent éventuellement des contacts sociaux, etc. ? » Il explique par ailleurs que chez les personnes qui ont coutume de se rendre à la messe chaque semaine, il semble probable qu’il faille mettre en exergue le fait qu’elles côtoient d’autres paroissiens, qu’elles récitent ou chantent des prières, que certaines partagent un verre ou une partie de cartes avec d’autres après l’office…
Activité physique, participation fréquente à des offices religieux : deux illustrations parmi beaucoup d’autres. Ainsi, plus fondamentalement, diverses études soulignent que l’activité professionnelle concourt au développement de la réserve cognitive. S’il apparaît que le métier a en soi un impact positif d’autant plus important qu’il est stimulant sur le plan cognitif, il est tout aussi évident que travailler diminue l’isolement social et augmente l’estime de soi. Or, il est bien établi que ces deux facteurs favorisent l’essor de la réserve cognitive.