Lorsque Sigmund Freud franchit l’enceinte de l’hôpital de la Salpêtrière, à Paris, le 13 octobre 1885, peut-être attend-il beaucoup du stage qu’il doit y effectuer. Il est moins probable qu’il ait imaginé le bouleversement que cette période de quelques mois allait provoquer dans son parcours professionnel et intellectuel. Jusqu’alors, S. Freud avait effectué des études de zoologie, obtenu en 1881 le titre de docteur en médecine et s’intéressait particulièrement à la psychiatrie et à la neurologie, discipline qui en était à ses balbutiements. C’est donc un stage de neurologie qu’il obtint en 1885 chez le professeur Jean Martin Charcot. Spécialiste de l’hystérie – sujet de débats dans les milieux psychiatriques –, il impressionne S. Freud au point que celui-ci, maintenant « initié » au champ des troubles d’origine psychique, s’en fait le porte-parole à Vienne, sans grand succès.
Son nouvel intérêt s’accroît lors d’un autre stage effectué à Nancy. À cette occasion, il commence à douter de l’efficacité de la suggestion hypnotique et décide d’appliquer avec les patientes hystériques une autre méthode thérapeutique, mise au point par son ami Josef Breuer et sa patiente Anna O. Il s’agit de la « cure par la parole », destinée à vaincre les « résistances » du malade pour permettre aux souvenirs refoulés de revenir à la conscience grâce à une association libre des idées. Débute alors une période de grande réflexion théorique – enrichie par les observations cliniques de ses patients – que S. Freud partage avec Wilhelm Fliess, otorhinolaryngologiste et témoin de la première heure.
L’inventeur de la psychanalyse
En 1896, le mot « psycho-analyse » est employé pour la première fois par S. Freud, au départ pour désigner une technique thérapeutique, mais qui va bientôt englober la théorie du psychisme qu’il est en train d’élaborer. Chez S. Freud coexistent en fait trois sources principales d’inspiration : les observations de patients ; les influences théoriques de l’époque, marquées par une nouvelle idée, celle de l’existence d’un « inconscient » (sous des acceptions diverses, selon qu’elles proviennent de philosophes, de psychologues ou de psychiatres) ; enfin de son auto-analyse, que S. Freud entreprend à la mort de son père en 1896.