Tradition anglo-saxonne, la recherche sur le bien-être a été délaissée en France par les sciences sociales. D’où l’intérêt d’un numéro sur ce thème. Un article analyse l’évolution du bien-être en France depuis vingt-cinq ans. Au-delà du PIB, la notion renvoie « à la fois à l’état général de santé, la bonne forme physique, l’absence de détresse psychologique et à la satisfaction globale de l’individu par rapport à sa vie ». Combinant autant les indicateurs objectifs (équipement en biens de consommation, logement), que subjectifs (aspirations, opinions), les chercheurs ont tenté d’effectuer une synthèse. Résultat : s’ils observent une amélioration des conditions de vie en termes de confort matériel, d’éducation ou d’accès aux loisirs, ils remarquent que certaines dimensions du bien-être se dégradent : hausse des contraintes financières et de la précarité, sentiment de mauvaise santé et d’insécurité, renforcement des « inégalités de modes de vie » et de leur perception. « Comment profiter pleinement de son temps libre lorsque le chômage, le développement des contrats courts ou le temps partiel subi compromettent l’accès à des biens essentiels tels que le logement ? », s’interrogent les économistes Régis Bigot et Sandra Hoibian. Parmi les autres articles notables, une enquête en milieu scolaire montre l’impact du ressenti des discriminations sur le bien-être. L’analyse des politiques de prévention du vieillissement révèle quant à elle une « injonction au bien-être » rendant l’individu responsable de son état. Un « modèle quelque peu culpabilisateur », selon les auteurs de l’article.
Marc Olano