Technique

Toute l’histoire de l’humanité peut être lue à travers l’histoire des techniques. Tout commence avec la pierre taillée. Les premiers choppers 1 apparaissent en Afrique, il y a 2,5 millions d’années. Ils sont contemporains de l’apparition du genre Homo (même s’il n’est pas impossible que les derniers australopithèques et paranthropes en aient fabriqué). Puis l’outil se perfectionne, manifestant un progrès des aptitudes intellectuelles et une maîtrise plus grande de l’homme sur la nature. Viendront alors les bifaces, la domestication du feu, la construction des huttes, l’arc, les lances, les outils en os et en bois, la pêche, la navigation... Les outils de pierre et le feu ont laissé des traces, mais ils ne sont que les indices visibles d’une technologie primitive qui avait bien d’autres facettes. Puis l’histoire avance par bonds. Chaque grande phase de transformations sociales est contemporaine de grandes inventions techniques. Après le paléolithique vient le néolithique. En plusieurs points du globe, à partir de -10 000 ans, la société et les techniques changent. Aux mutations sociales – apparition des villages, des chefferies, des nouvelles idoles religieuses – est associé un bouleversement des techniques : apparition de l’agriculture, de l’élevage et de la poterie. Cinq mille ans plus tard surgissent les premières grandes « civilisations ». Là encore, une nouvelle société (formée de cités-États, de commerce, de royautés sacrées) survient en même temps que de nouvelles techniques (l’écriture, la métallurgie et l’architecture monumentale). Quelles relations se nouent entre le changement technique et le changement social ? Personne n’a la réponse.

Puis les civilisations se succèdent, en Asie, en Afrique, en Amérique et en Europe. Chaque foyer de civilisation apportera son lot de techniques : dans les armées, la médecine, l’architecture, la navigation, la comptabilité, la sidérurgie ou encore l’agriculture.

Les Chinois – dont le génie technique est en avance sur l’Occident dans bien des domaines – s’illustrent dans l’agriculture (socle de charrue, harnais), l’industrie (pompes hydrauliques, machines à vapeur), le génie civil (construction de ponts), l’horlogerie, la médecine (acupuncture) et l’art militaire. Ils vont transmettre à l’Occident le papier, la poudre à canon, les caractères d’imprimerie et la porcelaine. Dans le domaine de la navigation, ils transmettront aussi l’usage de la boussole, du gouvernail et du compas nautique, sans lesquels « il est probable que les grands voyages d’exploration n’auraient jamais été entrepris » (R. Temple, Le Génie de la Chine, 3 000 ans de découvertes et d’inventions, 2000).

L’essor technique de l’Occident doit donc beaucoup aux autres civilisations. Mais il n’est pas resté inactif sur son propre sol. Par exemple, Jean Gimpel a fait un sort à l’idée d’une stagnation technique au Moyen Âge. Les techniques agricoles, les moulins à eau et à vent ou encore la sidérurgie ont connu du XIe au XIIIe siècle un véritable essor (J. Gimpel, La Révolution industrielle du Moyen Âge, 1975).