Pourquoi les Français accordent-ils une telle importance à l'orthographe de leur langue ? Bernard Traimond aborde la question d'un point de vue à la fois historique et critique. De la Renaissance à nos jours, en effet, l'écriture de la langue française a connu un processus de normalisation croissante, allant de la grammaire à la graphie. Dépassant le simple besoin de convention, elle a, souligne l'auteur, de multiples liens avec les hautes ambitions des défenseurs et illustrateurs de la langue.
Langue des Lumières, langue universelle, le français prétend être, au xviiie siècle, un modèle de clarté, de régularité et de beauté. De là découle l'entreprise de normalisation syntaxique, morphologique et, après la Révolution, orthographique dont elle est l'objet. L'aspect le plus singulier de ce processus est la manière dont, à travers l'instruction publique, l'orthographe, qui n'était d'abord qu'une spécialité d'imprimeur, est devenue aux yeux de tout le monde le premier des signes extérieurs de culture, et son absence un stigmate.