L'amplitude de vue et l'air frais qu'apporte la participation de nombreux chercheurs étrangers, notam-ment anglo-saxons, fait de cette nouvelle publication de la Revue du Mauss (Mouvement anti-utilitariste dans les sciences sociales) une contribution d'envergure à la sociologie de l'association, peu après celle de J.-L. Laville et R. Sainsaulieu, autre référence en la matière. On oubliera juste le côté très éclaté de l'ensemble et la propension à la répétition, inhérente à un ouvrage riche d'une trentaine de signatures.
D'emblée, à l'image du texte d'Alain Caillé, est soulignée la nature spécifique du secteur associatif, en comparaison d'avec les principes régissant les sphères étatiques et marchandes : le paradigme du don - de sa personne et de son temps - est au coeur d'une démarche où prime le lien sur le bien, et où l'intérêt instrumental est subordonné à la production de la solidarité et de la créativité.
En termes plus empiriques, la démonstration est ensuite faite du poids socio-économique croissant de ce secteur sans but lucratif dans le monde. Le vaste programme de recherche international initié par deux professeurs de l'université John Hopkins établit, outre son impact sur l'emploi et sur le PIB, quatre grandes catégories thématiques : éducation-recherche ; santé ; services sociaux ; culture-loisirs. Il distingue quatre aires géographiques où s'expriment des cultures de l'association fort variées.
Avec en arrière-plan la crise aigüe de l'Etat providence et la désintégration du travail, les arguments plaidant en faveur d'un nouveau mode de développement, encore largement hypothétique, centré autour du secteur associatif, sortent renforcés par une telle étude. Roger Sue démontre que la solution ne peut être institutionnelle, mais bien le fait d'un sursaut de la société civile. Plus fondamentalement, l'association exprime un nouveau type de sociabilité et d'identification individuelle. S. Pasquier montre que l'engagement associatif reflète chez l'acteur contemporain cette dialectique de la distance et de la proximité, du souci d'anonymat et de la volonté de reconnaissance, son refus d'être identifié à une catégorie d'appartenance et son idéal d'une identité personnelle.
Enfin, sont étudiés les Sel (Systèmes d'échange local), ces réseaux d'associations dans lesquels les membres échangent les services les plus divers, comme éventuels précurseurs d'un système social associationniste.
Michel Pastoureau : La passion des symboles
Michel Pastoureau est un historien médiéviste. Il a soutenu en 1972 une thèse sur « Le bestiaire héraldique médiéval ». Depuis 1982, il occupe une chaire d’histoire de la symbolique occidentale à l’École pratique des hautes études (EPHE) ; il est aussi directeur d’études associé à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) pour l’histoire symbolique des sociétés européennes, et délivre également des cours aux universités de Lausanne et de Genève. Ses travaux sur les sceaux, les armoiries et les images ont contribué à faire de l’héraldique une véritable science historique. Ses recherches portent aussi sur l’histoire des animaux et des végétaux, et sur l’histoire des couleurs, dont il est devenu un spécialiste reconnu au plan international.
Quelques publications
• L’Étoffe du diable. Une histoire des rayures et des tissus rayés
1991, rééd. Seuil, coll. « Point », 2007.
• Dictionnaire des couleurs de notre temps
1992, rééd. Bonneton, 2007.
• Une histoire symbolique du Moyen Âge occidental
Seuil, 2004.
• L’Ours. Histoire d’un roi déchu
Seuil, 2007.