Voter autrement pour choisir différemment ?

Vote par approbation, par note, etc. Depuis 2002, des chercheurs français expérimentent des modes de scrutin alternatifs à l'occasion de l'élection présidentielle. Un travail qui montre à quel point la façon de voter pèse sur le résultat final.

Autour de la table du Conseil des ministres, ce 26 septembre 1962, on débat du mode de scrutin qui permettra aux Français d’élire directement leur président. Georges Gorse, le ministre de la Coopération, suggère de s’inspirer de celui de l’Australie ou de l’Irlande : « Ça consiste à classer les candidats : on met 1 à côté de celui qu'on préfère, puis 2, 3, 4, etc. On fait ensuite, électroniquement, le total. » Réplique du général de Gaulle : « Votre système est excellent, mais il suppose que tous les électeurs soient polytechniciens. » Aux oubliettes le « vote préférentiel » (encadré), auquel la Ve République préfère alors le plus classique scrutin majoritaire à deux tours avec seulement deux qualifiés.

Trois modes de scrutin alternatifs testés

Soixante ans plus tard, l’idée d’un mode de scrutin alternatif n’est pourtant pas tombée dans l’oubli. On peut même la tester sans passer par Polytechnique : depuis 2002, année où le Premier ministre Lionel Jospin fut éliminé d’un cheveu du second tour par Jean-Marie Le Pen alors qu’il l’aurait très probablement écrasé en duel, des chercheurs proposent à des milliers d’électeurs de rejouer le match de la présidentielle avec d’autres systèmes de vote, plus nuancés.

En 2022, l’expérimentation « Voter autrement », parrainée notamment par le CNRS 1, a ainsi testé trois modes de scrutin alternatifs : in situ dans deux bureaux de vote strasbourgeois, mais aussi dans le cadre d’une expérimentation ouverte à tous en ligne et d’un sondage sur échantillon représentatif. Les électeurs ont pu voter par approbation, en agréant le nombre de candidats de leur choix ; par note, en évaluant chaque candidat sur une échelle de six notes allant de - 1 à 4 ; ou au « jugement majoritaire », en leur attribuant des appréciations allant de « À rejeter » à « Très bien ».