Comment mouches et abeilles, avec leur cervelle pas plus grosse qu’une tête d’épingle, font-elles pour contrôler si magnifiquement leur vol et ne pas s’écraser au sol à chaque instant ? Disposeraient-elles des capteurs sophistiqués de notre aéronautique moderne, radar, GPS et radioaltimètre ? Non !
Un seul accessoire suffit, élémentaire mais fondamental : le régulateur automatique de flux optique.
Lorsqu’un insecte vole en effet, l’image du sol défile d’avant en arrière dans son champ visuel, créant un flux optique, que l’on définit comme le quotient de la vitesse (horizontale) et de l’altitude. Le régulateur automatique de flux optique (des neurones détecteurs de mouvement) maintient constant ce quotient vitesse/altitude. Ainsi, si l’insecte modifie sa vitesse, le régulateur le contraint à changer aussi son altitude. Ceci explique pourquoi les insectes s’élèvent par vent arrière et descendent par vent debout.
L’animal n’a besoin de mesurer ni sa vitesse ni son altitude. Mais le système a ses limites : par exemple, les abeilles se noient en traversant une eau dormante. Pourquoi ? L’absence de rides (et donc de contrastes) met le système hors service, entraînant irrésistiblement les butineuses vers le bas.
C’est une équipe marseillaise qui a patiemment déchiffré le fonctionnement de ce système, au moyen de microélectrodes ultrafines, puis modélisé sur une puce pour équiper un microhélicoptère captif baptisé Octave. Celui-ci, du coup, reproduit les comportements jusqu’ici mystérieux des insectes.
Pour la petite histoire, les chercheurs ont déposé un brevet international sur « le pilote automatique de la mouche ».
Nicolas Franceschini, Frank Ruffier et Julien Serres, « A bio-inspired flying robot sheds light on insect piloting abilities », Current Biology, vol. XVII, n° 4, février 2007.