Au commencement était le signe

L’art pariétal est une source d’émerveillement et d’interrogations sans fin. Distinguer, identifier, analyser sont une chose ; on ne s’empêchera jamais de vouloir également interpréter. « Hic sunt leones » (« Ici sont les lions ») inscrivaient les anciens géographes pour remplir les blancs des cartes marquant notre ignorance de leur topographie. Combler les blancs est une tendance bien humaine. Mais lorsqu’il s’agit d’étendues temporelles équivalant à plusieurs milliers d’années, le risque n’est pas mince. L’histoire de la paléoarchéologie est surtout celle de ses errements interprétatifs.

Du signe au symbole, puis du symbole au signe

La démarche de Silvia Ferrara est certes fondée sur des connaissances sérieuses et un raisonnement rigoureux. Mais elle ajoute à cela une approche sensible qui permet aux lecteurs et lectrices de bien mesurer le degré d’ingéniosité et d’inventivité requis pour imprimer de telles marques dans de profondes cavernes. Dans l’obscurité, l’humidité, le silence et sans doute la crainte, là où la notion du temps se perd, il a fallu qu’un motif puissant pousse leurs auteurs à s’y aventurer. « Vivre l’expérience de près nous aide à réfuter les interprétations tirées par les cheveux et à écrémer les possibles, à en exclure certains, mais sans que cela nous aide à trouver des réponses définitives. » Il y a donc, déjà, ce spectacle qu’est la vision de ces œuvres pariétales. Encore faut-il prendre ce dernier mot au sens neutre d’artefact davantage que de production artistique. Car, quand bien même la beauté et la fidélité des reproductions forcent l’admiration, rien ne nous dit qu’il s’agit d’art, rappelle S. Ferrara. Peut-être pas davantage de religion non plus, pressés que nous sommes de vouloir établir des catégories dont nous ne savons pas si elles faisaient sens pour nos ancêtres.