Pierre Bourdieu est surtout connu du grand public comme l'intellectuel qui en 1993 avait publié La Misère du monde (Seuil) et s'était engagé dans les mouvements sociaux de 1995 ; celui, aussi, qui ne manquait plus de fustiger les experts, les journalistes, les « essayistes de cour » qui participaient, selon lui, à travers la mondialisation, à l'édification d'un monde dominé par l'idéologie néolibérale. Mais tout ceci ne doit pas faire oublier que Bourdieu, après avoir été un ethnologue de la Kabylie et de son Béarn natal, était un grand sociologue dont l'oeuvre provoquait - et provoque toujours - dans la communauté scientifique autant d'admiration que de critiques. Il était bien connu pour son caractère atrabilaire. S'il acceptait volontiers de rencontrer des acteurs de terrain (militants, artistes...), il refusait de se prêter à la confrontation de ses théories avec les autres sociologues de son temps. Il avait ses émules... et ses ennemis, en la personne de tous ceux qui se risquaient à un regard critique sur ses théories. Est-ce la raison pour laquelle, depuis sa disparition, peu de manifestations ont été organisées autour de son oeuvre ?
Marc Olano