L’idée de l’Encyclopédie (1748-1773) n’a pas surgi de l’imagination d’une poignée de philosophes. C’est d’abord une entreprise commerciale. Le projet émane d’un éditeur, nommé André-François Le Breton, qui cherche à faire traduire en français la Cyclopedia de Ephraïm Chamber, un ouvrage en deux volumes qui connaît le succès en Angleterre. A.F. Le Breton entrevoit une affaire lucrative qu’il confie à l’abbé de Gua de Malves (1712-1786). Mais celui-ci n’a guère les aptitudes requises pour une telle entreprise. Finalement, l’éditeur s’adresse à Denis Diderot. À l’époque (nous sommes en 1748), Diderot a 35 ans : c’est un « intellectuel précaire » qui commence tout juste à se faire un nom.
Fils d’un artisan maître coutelier, il a rejoint Paris pour poursuivre ses études et, depuis, mène une vie de bohème. Il a exercé les fonctions de précepteur de mathématiques et de musique, de clerc de notaire, de traducteur, etc. On le voit aussi dans les cafés, avec son ami Jean-Jacques Rousseau. Il est par ailleurs tombé amoureux de la belle Antoinette Champion, lingère de son état, qu’il épouse en cachette contre l’avis de son père. Il a rédigé quelques essais sulfureux qui lui ont valu la prison.
Diderot s’associe à son ami Jean Le Rond d’Alembert (1717-1783) qui, à 24 ans, est déjà membre de l’Académie des sciences. Les deux hommes s’attellent à un projet qui dépasse de loin celui de A.F. Le Breton.
Il ne s’agit plus de traduire mais de concevoir une œuvre entièrement nouvelle, révolutionnaire même.
Une entreprise colossale
Dans le « prospectus » de 1750 destiné à recruter des souscriptions, Diderot affiche ses ambitions. La première fonction de l’Encyclopédie sera de rassembler les connaissances éparses afin de les mettre à la disposition du lecteur. L’ouvrage devra donc être écrit « avec clarté ».