L’opéra, la psychanalyse… Comment ces deux champs sont-ils entrés dans votre vie ?
Ma première rencontre avec l’opéra s’est faite par hasard à l’âge de 15 ans. Je suis allé voir au cinéma Don Giovanni, de Joseph Losey, l’un des premiers films d’opéra. J’ai été foudroyé par cette rencontre. À la fois avec le personnage de Don Juan que je trouve extraordinaire et avec la musique de Mozart… À l’époque, je pratiquais déjà la guitare classique. Et par la suite, j’ai pris des cours de chant et j’ai eu la chance de travailler avec Alain Zaepffel, un grand contre-ténor. Quant à la psychanalyse, mon intérêt pour l’humain m’a naturellement orienté vers des études de psychologie après le baccalauréat. Et cet intérêt pour la musique ne m’ayant pas quitté, j’ai suivi une formation en musicothérapie. Dispositif intéressant mais un peu problématique dans la mesure où il est insoutenable de dire que la musique soigne. C’est la relation et l’utilisation qu’un sujet peut faire d’un médium artistique qui peuvent avoir des effets thérapeutiques.
Pourquoi vous êtes-vous tout particulièrement penché sur l’étude de la voix ?
Sans doute parce que cette question de la voix comme objet a été peu traitée en psychanalyse. Freud a mis en évidence plusieurs objets pulsionnels : le sein, les fèces... Il avait subodoré l’existence du regard mais pas de la voix. Lacan, lui, à partir de la fente de l’œil, va ajouter la question du regard et de la pulsion scopique – c’est-à-dire liée au plaisir de regarder. Il va également ajouter la voix, objet engagé dans l’acte de parole mais pas seulement. Lacan affirme que la pulsion « invocante », la pulsion liée à la voix, est celle qui est la plus proche de l’expérience de l’inconscient. Cela montre l’importance extrême de la voix dans le champ de la psychanalyse ! Et pourtant, contrairement à l’objet regard, Lacan développe très peu les enjeux théorico-cliniques de l’objet voix.
C’est d’autant plus étonnant que la voix est ce par quoi une analyse s’effectue…
Tout à fait. Trouver sa voix, si j’ose dire, au sens de pouvoir prendre la parole dans le concert du monde sans être envahi de la parole et la voix des autres, est l’enjeu même de la cure psychanalytique.