Entretien avec Suzanne Berger

Sciences Humaines : Que vous inspire le débat autour du déclin de la France ?

Suzanne Berger : C'est un débat qui revient de manière récurrente ! Il est généralement suivi d'un autre débat : « le renouveau de la France », « la France qui gagne » ou « qui renaît de ses cendres » ! Déjà, sous la IVe République, il avait été question de déclin. Pourtant, cette période a été le point de départ des trente glorieuses. Cette France de la IVe République, présentée comme ingouvernable, dépourvue d'infrastructures modernes, a entamé une période de croissance exceptionnelle. De là à conclure que le débat actuel masque une réalité plus positive... A l'évidence, les Français ne sont pas sortis d'un débat amorcé en 1983. Cette année-là, le gouvernement socialiste adopte une politique de rigueur donnant ainsi l'impression de l'incapacité des politiques à peser sur l'économique. Or l'élection de François Mitterrand avait suscité un espoir énorme. Avant même que ne surgissent les débats autour de la mondialisation et de la remise en cause des Etats-nations, les Français ont fait la triste expérience de l'apparente impuissance de la politique à changer le cours des choses. La cohabitation de 1986 avec un gouvernement libéral ne dissipera pas ce sentiment d'impuissance. Le débat actuel sur le déclin de la France semble montrer que la désillusion ne s'est pas totalement dissipée.