Et si on se passait de médecin ?

Accoucher ou mourir à domicile : à contre-courant de nos sociétés de plus en plus médicalisées, certaines personnes veulent retrouver plus d’autonomie dans les moments clés de leur existence.

En France, plus de 80 % des Français déclarent vouloir passer leurs derniers instants chez eux. Pourtant seul un quart des décès a lieu au domicile 1. Pourquoi un tel écart entre les souhaits et la réalité ? Certes, les personnes âgées demeurent de plus en plus longtemps chez elles, avec la possibilité de bénéficier d’interventions de professionnels du domicile et d’adapter leur logement à leur perte d’autonomie via des aides domotiques. Les pouvoirs publics s’appliquent d’ailleurs à promouvoir le maintien à domicile des seniors, si bien que l’âge d’entrée en maison de retraite tend à reculer. Mais ces orientations politiques ne prennent pas en compte la toute fin de vie : deux tiers des décès ont ainsi lieu à l’hôpital et plus d’un dixième en maison de retraite, quand, dans le même temps, l’essor des soins palliatifs à domicile reste très relatif en France 2.

Le retour au « naturel »

Au-delà des chiffres, que recouvre le désir de « mourir chez soi » ? Une enquête de l’Observatoire national de la fin de vie (ONFV) a mis en lumière les motivations des personnes qui expriment ce souhait 3. Il fait d’abord écho à une volonté de préserver des repères : le domicile est ainsi vécu comme le « refuge de l’intimité » et des habitudes. Le domicile est aussi perçu comme le lieu d’une mort moins « déshumanisée » et « plus naturelle » qu’à l’hôpital. La mort chez soi serait en quelque sorte considérée comme une mort plus « douce ». Ce consensus en apparence unanime mérite d’être nuancé. La même enquête de l’ONFV montre en effet que le souhait de mourir à domicile fluctue : ce qui est exprimé lors d’un sondage par une personne en bonne santé peut être bien différent du choix fait par une personne souffrant d’une maladie grave, qui préférera in fine une prise en charge à l’hôpital pour ses derniers jours.