
Quel aventurier êtes-vous ? Baroudeur ? Sportif ? ou encore scientifique ? Ou peut-être simplement lecteur ou lectrice, fascinés par les exploits de ces femmes qui bien avant les révolutions féministes récentes, ont parcouru le monde en transgressant les normes pour endosser des rôles traditionnellement considérés comme masculins.
Les manières de voyager ont évolué au fil du temps. Peut-on encore se dire aventurier à l’heure des transports intercontinentaux ultra rapides, de l’explosion des agences touristiques qui proposent « d’organiser l’aventure », à l’heure aussi où les femmes peuvent se le permettre- presque- autant que les hommes ?
« Un jour, sans doute, des express transasiatiques emporteront des touristes confortablement installés dans des trains de luxe, mais alors une grande partie du charme aura disparu et pour ma part, je me réjouis d’être allée de Ceylan à la Mongolie avant que ce temps soit venu. » écrivait Alexandra David Néel, première européenne à atteindre Lhassa en 1924.
La littérature a alerté depuis longtemps sur ce sentiment d’un « épuisement du monde » (selon les mots de François Maspero). Le grand anthropologue Claude Lévi-Strauss annonçait dans Tristes tropiques « la fin des voyages ». Au début du 19e siècle, Victor Hugo déplorait la disparition des diligences et se plaignait d’être « tout étourdi par trois nuits de malle-poste »[1] 1…
Et pourtant, la propension à aller voir ailleurs ne serait-elle pas, comme le soutenait Aristote dans la Métaphysique, la manifestation d’un « désir naturel de connaissance » ? Une nécessité d’« habiter le monde » comme l’a longuement décrit l’écrivain-voyageur Nicolas Bouvier ? Et le philosophe Emmanuel Kant, ce voyageur immobile qui n’avait jamais quitté sa ville natale de Königsberg pour sa promenade journalière, fut l’un des plus grands penseurs du cosmopolitisme !
A partir du 20e siècle, les visages de l’aventure se sont transformés. L’exploration a laissé place aux recherches plus scientifiques ou à des exploits sportifs encore jamais réalisés. Bénéficiant de leur émancipation progressive au cours des derniers siècles, les femmes s’y sont engouffré. Elles sont devenues ethnologues, archéologues, primatologues… ou se sont attelées à des exploits sportifs dans lesquels leur détermination, leur résistance, leur goût du risque n’avait rien à envier à ceux des hommes. Déjà, certaines de leurs aïeules avaient montré leur goût pour l’inconnu, l’incongru, et leur curiosité de découvrir le monde. Longtemps restées dans l’ombre, on les découvre aujourd’hui grâce aux travaux historiques récents qui s’attachent à redonner une visibilité à celles qui constituent juste la moitié de l’humanité.
Ce sont les tribulations passionnantes et toutes différentes de quelques-unes de ces femmes que nous vous livrons ici, en sachant que notre sélection nous a contraints à en laisser beaucoup d’autres de côté… C’est pourquoi, en vous souhaitant bonne lecture, on peut affirmer que l’aventure continue !