L'École dans plusieurs mondes

Jean-Louis Derouet (dir.), De Boeck université/INRP, 2000.

L'école de Jules Ferry, émanation d'un Etat-nation centralisateur, semble avoir vécu. Depuis une quinzaine d'années, l'institution scolaire est tiraillée entre différentes logiques : la recherche de l'efficacité, la prise en compte de l'hétérogénéité des élèves, la référence communautaire, la décentralisation progressive des décisions vers l'échelon local...

Pour Jean-Louis Derouet, qui dirige le Groupe d'études sociologiques de l'Institut national de recherche pédagogique, c'est à partir des interprétations des acteurs et des ajustements qui en découlent que se crée le sens et l'efficacité des politiques scolaires. Celles-ci ne sont plus seulement issues des décisions du ministère. Ce sont les établissements qui sont devenus le « lieu central » où les solutions choisies varient selon le public, l'équipe éducative, la demande des familles...

Les contributions de ce livre, qui s'appuient sur une démarche anthropologique et sur le modèle théorique des logiques de l'action politique de L. Boltanski et L. Thévenot, en illustrent bien le titre : « L'école dans plusieurs mondes ». C'est-à-dire une école dont le fonctionnement est le résultat d'un enchevêtrement souvent complexe de multiples facteurs : droits des élèves, recherche de performance ou libre-concurrence... On comprend par exemple comment les règles disciplinaires ou les décisions d'orientation naissent du jeu des différents acteurs et aboutissent à des négociations et des compromis variés plus ou moins satisfaisants...

Une interrogation traverse la diversité des sujets traités : l'école gardera-t-elle « un projet social unifié sur la socialisation de la jeunesse, la fabrication des compétences civiques et productives qui permette à la société de se perpétuer » ? Si, selon les auteurs, cette question est encore de l'ordre de l'indécidable, elle peut cependant trouver une réponse dans la recherche d'une (nouvelle) culture commune du corps enseignant.

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