L'Instinct du langage. Steven Pinker, 1994

L’instinct du langage. 1994, tr. fr. Odile Jacob, 2008.
La parole est un instinct ! Voilà l’idée provocante que défendait Steven Pinker dans son livre. Il annonçait ainsi le grand retour de la nature humaine.

En publiant L’Instinct du langage en 1994, Steven Pinker a voulu secouer les esprits. Parler « d’instinct », à propos du langage, c’était affirmer un paradoxe (comment admettre que l’anglais, l’italien, le chinois puissent avoir quelque chose d’instinctif ?), c’était aussi réhabiliter un mot tabou – l’instinct – qui avait été écarté de la psychologie humaine depuis des décennies.

L’idée d’un langage « inné » n’était pas tout à fait nouvelle. Noam Chomsky, le père de la grammaire générative, affirmait depuis longtemps qu’une même structure grammaticale – comme le découpage des mots en sujet-verbe-complément (SVO) – n’est pas contradictoire avec la diversité des langues et l’infinie variation des phrases qu’elle génère. Pourquoi ne pas admettre que des structures profondes puissent produire une grande variété de formes : tout comme la même anatomie des vertébrés (avec une colonne vertébrale, quatre membres et une tête) produit un nombre infini d’espèces : reptiles, oiseaux et mammifères (dont les humains).

Dans L’Instinct du langage, S. Pinker élargissait le propos. Contrairement à l’idée courante, affirmait le linguiste, les parents n’apprennent pas aux enfants à parler. Les enfants apprennent à parler tout seuls, en captant grâce à une aptitude innée les sons, puis les mots, puis leur sens, leur structure. C’est grâce à cette facilité déconcertante à s’approprier la langue qu’ils peuvent acquérir des milliers de mots et les règles de grammaire en l’espace de quelques années. L’apprentissage du langage ne commence pas avec les premiers mots (vers 18 mois). On sait aujourd’hui que déjà, dans le ventre de sa mère, l’enfant reconnaît spontanément la prosodie du langage maternel. Après la naissance, dès les premiers mois, il a compris comment était organisé le langage en séquences pertinentes : sons, syllabes et mots. Puis vers 2 ans démarre la grande « explosion linguistique ». On estime que l’augmentation du vocabulaire saute au rythme d’un nouveau mot au moins toutes les deux heures, rythme que l’enfant gardera jusqu’à la fin de l’adolescence.