Il ne faut pas se fier au titre, un peu provocateur, adopté par les deux auteurs. En réalité, leur thèse est que les maux dont, régulièrement, l’on accable l’enseignement supérieur – taux d’échec élevé en premier cycle, absence de débouchés pour les étudiants, baisse du niveau imputable à l’arrivée de nouveaux étudiants – ignorent la réalité du monde universitaire. Répété à l’envie pour mieux justifier des réformes d’inspiration libérale, le diagnostic de crise comporte fondamentalement un enjeu politique. On voudrait transformer les universités en entreprises en oubliant que le savoir n’est pas une marchandise et que le malaise vient avant toute chose des choix économiques, politiques et sociaux qui ont été effectués pour réformer l’État et le marché du travail. La thèse est discutable, au meilleur sens du terme. Elle est illustrée en tout cas par une série de statistiques qui vont à rebours des représentations pessimistes. Les auteurs montrent par exemple que le niveau monte et que rien ne permet d’affirmer que l’université est une usine à chômeurs. Les résultats d’enquêtes menées auprès d’étudiants de premier cycle viennent compléter le tableau et rappeler que certes l’enseignement est un facteur de sélection sociale, mais qu’il constitue aussi un bien commun pour une société qui se débat avec la crise économique.
L'université n'est pas en crise
L’université n’est pas en crise . Romuald Bodin et Sophie Orange , Le Croquant, 2013, 213 p., 19 €.