« Quand on est pauvre « toute l’énergie est consacrée à sauver la face, dans les premiers temps, afin de ne pas être stigmatisé. À partir du moment où vous êtes catalogué comme chômeur, pauvre, précaire, en mauvaise santé, instable, la partie est presque perdue. La difficulté est contagieuse, ou perçue comme telle. Le précaire devient un méchant miroir où chacun peut se projeter pour se faire peur. Comme une bête de foire, qui titille les mauvais instincts et apaise les consciences. Il terrorise temporairement, parce qu’on pourrait être à sa place, mais rassure en même temps, car on n’est pas à sa place. Cela dit, ce miroir n’a pas de place dans la société, il est tabou. (…) », écrit Gwenn dans son livre La Chômarde et le Haut Commissaire (1). Plus tard, interviewée pour la sortie de son livre, elle racontera qu’en période de chômage, elle évitait de faire ses courses aux mêmes heures de la journée que les autres chômeurs. Elle voulait s’en sortir, ne pas s’installer dans un statut d’assistée. Dans ce cas, être pauvre, c’est enchaîner petits boulots, chômage, intérim, périodes de RMI…, se sentir coupable, honteux et se méfier du regard des autres. Une enquête du Secours catholique rapporte d’ailleurs qu’une importante proportion de familles pauvres juge leurs voisins « peu sympas ». Ces familles sont généralement presque toutes locataires d’appartements en ville ou en cité, rarement d’une maison individuelle. Ces logements ont trois ou quatre pièces, l’eau, une baignoire ou une douche, un WC à l’intérieur et le chauffage. Et si toutes ont la télévision, on y trouve peu d’ordinateurs qui sont, de plus, rarement reliés à Internet. L’appartement se situe dans des zones excentrées où il y a toutefois des petits commerces et la Poste à proximité. Généralement, les transports en commun sont le seul moyen de locomotion. Rien que de très ordinaire. Pourtant tout est plus compliqué. À commencer par les impayés. Dans ce secteur, tous les indicateurs sont au rouge, indique le rapport de la commission « Familles, vulnérabilité, pauvreté » (2). L’argent est une hantise, trouver un emploi le parcours du combattant, et quand enfin une porte s’ouvre : « Vous comptiez avoir cinq jours de travail ? Que nenni… trois jours seulement et les deux derniers jours de la semaine vous n’avez que très peu de chances de retrouver une mission. Et n’oubliez pas ces employeurs qui viennent vous voir vendredi soir pendant le dernier quart d’heure de la semaine alors que vous pensiez revenir lundi : “Votre contrat est fini ce soir.”
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pauvreté comment faire face ?
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