À environ 4 ans, la grande majorité des enfants maîtrisent les bases de leur langue maternelle, quel que soit leur environnement ou leur culture. Les spécialistes s’accordent sur le fait que le langage est un don biologique et décrivent les mêmes phases de son développement. On sait aussi que les gènes et l’environnement interagissent pour produire des structures cognitives complexes. Dans quelle mesure ? Peut-on développer le don de parole ? Comment ?
À ces questions, de nombreuses études récentes, permises notamment par les progrès sensibles de la neuro-imagerie, ont ouvert des pistes jusque-là inexplorées. Tout en indiquant que les connaissances sur le développement du cerveau sont encore parcellaires, Michèle Kail, spécialiste de l’acquisition du langage, directrice de recherche au CNRS et notamment auteure de L’Acquisition du langage (Puf, collection Que sais-je ? 2015), relève que la formation des synapses, cruciale pour le développement précoce du langage, est en plein boom de 0 à 12 mois, comme le démontre aussi une étude parue en 1997 1. La preuve qu’il faut stimuler bébé le plus tôt possible ? Oui, si l’on en croit aussi d’autres études qui démontrent que jusqu’à 4 mois, il présente d’étonnantes capacités de discrimination auditive. De très nombreuses expériences, démontrent que dès la naissance, le bébé réagit à toutes les informations sonores 2.
Communication non verbale : la clé de la parole
Bénédicte de Boysson-Bardies, psycholinguiste spécialiste de l’acquisition du langage chez les jeunes enfants et directrice de l’équipe d’organisation vocale et gestuelle du laboratoire de psychologie expérimentale de l’université de Paris-V 3, va plus loin dans la synthèse des connaissances actuelles : « La mémorisation de l’organisation mélodique de la langue parlée existe dès la fin de la vie fœtale. Une petite histoire dite tous les jours par la mère durant le dernier mois de la vie intra-utérine sera ‘‘reconnue’’ dès la naissance grâce à son rythme particulier. Dès qu’ils arrivent au monde, les bébés préfèrent la voix de leur mère à toute autre et préfèrent aussi entendre parler leur langue maternelle ». Et de noter que ces préférences subsistent même sans mots et sans syllabes : « Le rythme et l’intonation sont les premiers facteurs nécessaires à la reconnaissance et à l’organisation du langage. C’est grâce aux durées et aux variations d’intonation que le bébé va progressivement repérer les formes organisées de la langue et repérer les mots ».