Les critiques du libéralisme ne manquent pas. L’ouvrage de Dany-Robert Dufour s’en distingue pour deux raisons principales. La première tient au fait que son travail est celui d’un philosophe qui pense le monde comme une totalité, à savoir comme un système qui interagit en permanence et qui exprime une circulation du sens. D’où, d’autre part, son analyse qui embrasse les nouveaux rapports qu’instaure le libéralisme : le rapport à soi, à l’autre, à la politique, à la religion, à la langue, à l’art, voire à l’inconscient. Mais cette vision d’ensemble ne vaut que par la radicalité de son questionnement qui permet de tisser le fil conducteur d’une critique lucide.
Revenant sur la prétendue sortie du religieux, D.‑R. Dufour montre que nous assistons plutôt au remplacement d’une divinité par une autre, en l’occurrence un divin marché sadien dont le principal commandement – « Jouissez ! » – conduit à un comportement de consommateur pulsionnel.
Dans un rapport dialectique permanent, le marché parvient ainsi à intégrer jusqu’à ses opposés pour les transformer en une arme nouvelle pour ses propres fins. Ainsi de la critique soixante-huitarde, la critique artiste, digérée jusqu’à devenir une composante du soft-management et de la créativité marketing infinie.
La langue elle-même est investie (puisque tout fait sens et que rien n’est innocent) ; mieux vaut parler de gouvernance que de pouvoir, de genre plutôt que de sexe… Cette progressive création d’une « novlangue » accompagne celle d’un « novmonde » technologique qui, sous couvert d’un progrès permanent, ne résout les problèmes qu’en créant de nouveaux dangers incontrôlés dans un cercle parfaitement vicieux.
Enfin, et c’est l’aspect le plus inquiétant, le monde du marché conduit, selon l’auteur, à une modification de l’économie libidinale et pulsionnelle elle-même. L’inconscient, au lieu d’être d’une essence intemporelle et infrangible, subirait les effets du dérèglement généralisé auquel conduit le libéralisme (« Laissez faire ! »).
On le voit, le livre de D.‑R. Dufour porte loin le questionnement. On peut ne pas partager ses conclusions. Espérons qu’elles susciteront au moins le débat.
Revenant sur la prétendue sortie du religieux, D.‑R. Dufour montre que nous assistons plutôt au remplacement d’une divinité par une autre, en l’occurrence un divin marché sadien dont le principal commandement – « Jouissez ! » – conduit à un comportement de consommateur pulsionnel.
Dans un rapport dialectique permanent, le marché parvient ainsi à intégrer jusqu’à ses opposés pour les transformer en une arme nouvelle pour ses propres fins. Ainsi de la critique soixante-huitarde, la critique artiste, digérée jusqu’à devenir une composante du soft-management et de la créativité marketing infinie.
La langue elle-même est investie (puisque tout fait sens et que rien n’est innocent) ; mieux vaut parler de gouvernance que de pouvoir, de genre plutôt que de sexe… Cette progressive création d’une « novlangue » accompagne celle d’un « novmonde » technologique qui, sous couvert d’un progrès permanent, ne résout les problèmes qu’en créant de nouveaux dangers incontrôlés dans un cercle parfaitement vicieux.
Enfin, et c’est l’aspect le plus inquiétant, le monde du marché conduit, selon l’auteur, à une modification de l’économie libidinale et pulsionnelle elle-même. L’inconscient, au lieu d’être d’une essence intemporelle et infrangible, subirait les effets du dérèglement généralisé auquel conduit le libéralisme (« Laissez faire ! »).
On le voit, le livre de D.‑R. Dufour porte loin le questionnement. On peut ne pas partager ses conclusions. Espérons qu’elles susciteront au moins le débat.