Sciences Humaines : Dans votre dernier livre, vous décrivez la trajectoire des « dérouilleurs », ces habitants originaires de quartiers réputés difficiles et pour la plupart issus de l'immigration, qui sont parvenus à « s'en sortir » en vivant ailleurs. Comme vous le montrez, cette réussite repose souvent sur une rencontre fortuite...
Azouz Begag : Au cours de leur témoignage, les dérouilleurs font en effet pour la plupart état d'une rencontre fortuite, qui avec un instituteur, qui avec un professeur. Hors de la vie scolaire, d'autres personnes ont pu être à l'origine d'un déclic : un travailleur social, un prêtre ou un pasteur, impliqué dans le monde associatif. Des dérouilleurs sont certes parvenus à s'en sortir seuls : en se projetant dans l'avenir, ils ont trouvé suffisamment de motivation pour entreprendre des démarches auprès de personnes célèbres qui leur mettront ensuite le pied à l'étrier. Je pense à ce Mohand qui, persuadé qu'on pouvait gagner sa vie en écrivant des chansons, a soumis des textes à des célébrités du monde du spectacle (l'actrice Melina Mercouri, le chanteur Mouloudji, etc.). Ces dernières lui ont fait d'autant plus confiance qu'il s'était persuadé lui-même de son talent !