Les pirates, et plus largement les marins, ont, entre les 17e et 18e siècles, changé la face du monde. Telle est la thèse de l’historien Marcus Rediker. En effet, ces premiers « travailleurs transnationaux » en rupture de ban ont inventé des formes d’organisation sociale et créé des zones autonomes face aux pouvoirs centraux sous la bannière de l’égalité et de la liberté. Dans cette histoire par le bas, dont les « ouvriers de la mer » embarqués sur des navires battant pavillon pirate sont les personnages principaux, l’auteur nous invite à découvrir ce qu’il appelle « les laboratoires de la modernité », dans lesquels plusieurs milliers d’hommes (mutins, esclaves marron) « se réunirent, coopérèrent, imaginèrent et parfois même construisirent ensemble des alternatives subversives au capitalisme ». Ces hommes pauvres, parfois enrôlés de force, sous-alimentés et aux prises avec une discipline sévère et violente, ont commencé par se révolter et prendre possession de leur embarcation. Leur chance : une fois les officiers maîtrisés, loin du pouvoir central, ils disposaient alors de toute latitude pour s’autoorganiser : ils choisissaient leur capitaine, généralement un homme reconnu pour ses qualités au combat. S’il conduisait les abordages et les pillages, c’est au bosco, aussi appelé quartier-maître, que revenait le soin de partager en parts égales le butin, ainsi que de rendre la justice à bord du navire.
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