On peut traiter quelqu'un de « petit con » ou de « mon salaud » affectueusement. Cela vaut aussi pour le « parler jeune ». « Nique ta mère, » « ta race », « bitch », « garage à bite »... Prises au premier degré, ces insultes sont d'une vulgarité apparemment sans retenue. Mais les spécialistes savent qu'un double mécanisme en désamorce souvent le sens. Tout d'abord, l'usage fréquent d'un juron le vide en partie de son contenu. Cela fait longtemps que les « merde » et « fait chier » n'évoquent plus la défécation dans le langage courant. De même aujourd'hui pour « ta race ». Le juron « putain » (ou « fuck ») est devenu simple formule rituelle. Ensuite, l'insulte a un usage ludique, qui suppose une connivence (« entre copine, "sale arabe "peut être affectueux »), voire une admiration (« t'a vu comment il joue au foot, ce fils de pute »). L'insulte n'est pas toujours aussi violente que le pensent les adultes (enseignants, parents). Banalisée, elle perd de sa charge offensive et ne choque plus que ceux à qui elle n'est pas destinée.
Références
« Les insultes. Approches sémantiques et pragmatique », Langue française, n° 144, décembre 2004.