Quelle est leur origine ?
« On ne peut pas ne pas communiquer » : cet axiome est l'un des plus connus de l'approche systémique en psychologie, dont le centre d'intérêt est non pas l'individu mais les relations unissant les différents éléments d'un système (famille, organisation, société...). Au milieu des années cinquante, s'est ainsi développée une démarche qui repose sur la notion de système, et qui a été particulièrement étudiée par l'école de Palo Alto, du nom d'une petite ville de Californie. Parmi les chercheurs à l'origine de ce mouvement, on retrouve le psychiatre Don D. Jackson (1919-1968), Milton Erickson (1901-1980), spécialiste de l'hypnose clinique, ou encore Paul Watzlawick, qui s'intéressera particulièrement à la communication. Mais le fer de lance de l'approche systémique reste l'anthropologue Gregory Bateson (1904-1980), le premier à avoir cherché à appliquer la démarche systémique aux sciences humaines et au traitement des troubles psychiques. En 1956, il développe avec son équipe de chercheurs une conception novatrice de la schizophrénie 1, qui serait le seul mode de fonctionnement possible d'un individu en réaction aux communications familiales perturbées. C'est lors de cette recherche, initiée en 1952, que G. Bateson va développer la notion, centrale en thérapie systémique, de la « double contrainte » : dans une relation, entre une mère et son enfant par exemple, l'adulte émet de manière répétée deux messages contradictoires simultanément et à des niveaux différents de communication. La mère peut repousser l'enfant qui souhaite un câlin tout en lui disant qu'elle l'aime et en lui reprochant son absence de tendresse à son égard. L'enfant, pris dans ces injonctions paradoxales, ne peut sortir de cette communication pathologique, et cette situation pourrait provoquer la schizophrénie. Cette conception a eu d'autant plus d'écho qu'elle s'inscrivait dans les débuts de l'antipsychiatrie, mouvement philosophique et médical qui récuse la conception occidentale de la folie (qui serait une construction sociale, un anticonformisme par rapport à la norme établie).
Une seconde étude a elle aussi permis la renommée de l'école de Palo Alto. En 1954, D. Jackson présente une communication restée célèbre 2 : « La question de l'homéostasie familiale ». La famille y est définie comme un système homéostatique, c'est-à-dire qu'elle cherche à maintenir un équilibre interne, nécessaire à son existence. Il fondera cinq ans plus tard le Mental Research Institute (MRI) à Palo Alto, dont la finalité est d'appliquer, dans le champ des thérapies, les découvertes sur la communication du groupe de Palo Alto. De nombreuses études issues de l'approche systémique, sur l'alcoolisme, la toxicomanie ou la psychose, sont menées à cette époque et vont permettre de légitimer la volonté de G. Bateson de développer une nouvelle forme de thérapie, centrée sur les « défaillances » du système.