Londres a connu une extraordinaire reconversion. Si la ville devait historiquement sa réputation à la domination politique qu’elle exerçait sur le globe en tant que capitale de l’Empire britannique, elle la doit aujourd’hui à sa suprématie dans la nouvelle économie des services. C’est ce qui lui vaut d’être aujourd’hui unanimement considérée comme la ville globale par excellence. L’étude de référence de Saskia Sassen sur New York, Londres et Tokyo n’y est évidemment pas pour rien, elle qui fait des « services de coordination » de l’activité économique mondiale le nouvel attribut du pouvoir planétaire (1). La « ville globale » de S. Sassen est le lieu où se concentrent de tels services, de la finance au conseil en management en passant par l’assurance. Et Londres est à ses yeux l’archétype de cette ville d’un nouveau genre. Les données réunies en 2001 par le réseau de recherche sur les villes globales de l’université de Loughborough, le Globalization and World Cities (GAWC) (2), sont venues confirmer cette appréciation : Londres y occupait la première place dans le domaine des services avancés pour les entreprises (APS, selon son sigle anglais), une position qu’elle vient juste de céder.
Si l’on compare en effet l’évolution du classement des villes du GAWC entre 2000 et 2008, il apparaît que la capitale anglaise a perdu de très peu sa prééminence sur New York. Elle obtient un indice de connectivité (dans les réseaux de services globaux) légèrement inférieur (98,9) à celui de la ville américaine (100). Entre les deux années, le trio de tête n’a cependant pas changé : Londres, New York et Hong Kong (81,44) mènent la danse des villes globales. Elles ont été rejointes par Paris (76,83) et Singapour (73,36) qui ont toutes deux dépassé Tokyo, la troisième ville globale que S. Sassen avait identifiée en 1991.
La City, le célèbre « Square Mile » sur lequel s’étend le centre historique de la ville, est depuis des lustres le synonyme de la place financière londonienne. C’est dans ce quartier que se concentre aujourd’hui une part importante des services destinés aux entreprises. La crise bancaire mondiale de 2008-2009 l’a bien montré, la finance est essentielle au fonctionnement de l’économie mondiale. C’est cependant la coexistence d’un large éventail de services qui fait de Londres un centre décisif de l’expansion économique mondiale. Au-delà de la banque et de la finance, des services professionnels comme l’assurance, la comptabilité, l’assistance juridique, la publicité et le conseil en management sont en effet essentiels au capitalisme contemporain. La spécialisation de ces activités, de même que leur diversification, a donné lieu à des services complexes qui se situent souvent à cheval entre plusieurs secteurs. Ainsi la banque et l’assurance ont largement fusionné au cours des deux dernières décennies et de nombreuses agences de conseil offrent une prestation de service combinant conseil en management, aide juridique et expertise comptable. L’intensité des interactions entre ces services internationaux constitue la marque de fabrique de Londres, tout en contribuant à l’atmosphère électrique de la ville.