Make China Great Again ?

Géopolitique de la Chine. Une nouvelle thalassocratie, Hugues Eudeline, PUF, 2024, 226 p., 15 €.

Géopolitique de la Chine. Une nouvelle thalassocratie, Hugues Eudeline, PUF, 2024, 226 p., 15 €. - Sciences Humaines n°373

On aurait tort de l’oublier : en 1820 la Chine était encore la première puissance économique de la planète, avec 32,9 % du PIB mondial. Par la suite, l’empire du Milieu eut à souffrir des entreprises militaro-commerciales occidentales et de leur lot d’humiliations aux séquelles durables. Aujourd’hui, Pékin a opéré un formidable redressement économique et, pour consolider sa puissance, procède à un développement rapide de sa puissance maritime. Fin connaisseur de ces questions, l’auteur s’efforce de mettre en évidence la stratégie chinoise à l’heure où le protectionnisme occidental et les fragilités de l’économie du pays grèvent la croissance des exportations massives. À défaut de convaincre les pays riches de consommer les produits chinois en plus grande quantité, est-il pensable de les y amener par la force ? Selon l’auteur, la Chine conserve des atouts, car elle demeure la première productrice mondiale de nombreuses ressources minérales et dispose d’une large palette de moyens de pression. Mais pour devenir une thalassocratie globale, encore faut-il que son influence se déploie sur tous les plans. L’auteur rappelle que, civilisation quatre fois millénaire, la Chine a le sens du temps long, elle le maîtrise et sait analyser le retour d’expérience historique. Entre aspiration à se venger du « siècle d’humiliation » et raidissement autoritaire, le pouvoir chinois est engagé dans une course pour la première place mondiale. Sa stratégie maritime se déploie obstinément, tout en maintenant une culture de l’ambiguïté et un recours habile à un large éventail de moyens juridiques. La Chine travaille à acquérir toutes les composantes d’une puissance navale globale. Aux yeux de l’auteur, cette aspiration deviendra réalité le jour où elle disposera de forces qui lui permettent de maîtriser ses mers proches. Aujourd’hui, elle poursuit étape par étape son implantation en mer de Chine méridionale et sur les détroits, ce qui lui permet de contrôler une grande partie des flux maritimes au détriment des États-Unis. Reste à tenir compte de deux facteurs : l’avenir de son économie, qui continue de se dégrader, et l’inexpérience du combat, indispensable pour prétendre à une efficacité opérationnelle.