La « société du risque »
Pour le sociologue anglais Anthony Giddens, les sociétés actuelles sont de plus en plus « réflexives » : elles posent sur elles-mêmes, leurs institutions et leurs traditions, un regard critique systématique.
Cette réflexivité serait entretenue notamment par les débats autour des risques technologiques qui caractérisent ces mêmes sociétés : en effet, ces risques remettent en cause les modalités d'exploitation des richesses naturelles, mais aussi la notion de progrès et le statut de la science. Comme son homologue allemand Ulrich Beck, A. Giddens parle donc des sociétés actuelles comme de « sociétés du risque » : en plus des risques prémodernes, naturels et prévisibles (external risks), elles se caractériseraient par des risques produits par elles-mêmes et moins probabilisables (manufactured risks).
Outre la pollution et les risques, elles seraient confrontées à une perte de sens. Cependant, l'importance du risque dans les préoccupations quotidiennes des individus et des gouvernements peut aussi s'interpréter comme le prix à payer pour des sociétés plus tournées vers l'avenir que vers le passé. Ces thèses sont exposées notamment dans Les Conséquences de la modernité (L'Harmattan, 1994). Signalons également, disponible sur le Web, « Lecture on Risk » : http://news.bbc. co.uk/hi/english/static/events/reith_99
Pour Ulrich Beck - professeur de sociologie à l'université de Munich qui, comme Anthony Giddens, enseigne également à la prestigieuse London School of Economics -, les sociétés modernes ne se singularisent plus seulement par leur capacité de production de richesses, mais aussi par les risques produits par elles-mêmes à travers leurs systèmes productif et scientifique. C'est ce qu'il expose dans son célèbre ouvrage paru en 1986 (peu après l'accident de Tchernobyl), Risiko Gesellschaft, traduit récemment en français (La Société du risque, Aubier, 2001).