Les grands classiques
• Hippocrate, le fondateur
Si l’étude du corps humain est aussi ancienne que l’humanité, l’inspirateur du célèbre serment prêté par les médecins en reste une figure de proue. Né au 4e siècle avant notre ère, Hippocrate fédère une école dite de Cos – nom de son île de naissance – s’inspirant de la philosophie d’Empédocle. Il assimile le corps humain à quatre éléments cardinaux, fonctionnant par couples de contraires : l’air et la terre, l’eau et le feu. Notre santé dépend de l’équilibre des « humeurs » correspondantes dans l’organisme, à savoir le sang, le phlegme, la bile jaune et la bile noire. Trop de l’un ou pas assez de l’autre entraîne la maladie. Le rôle du médecin est essentiellement d’accompagner et de favoriser le rééquilibrage qui se met naturellement en place chez un malade : une caractéristique de l’école hippocratique est de considérer la nature comme automédicatrice.
• Nietzsche et Foucault, la veine critique
La métaphore de la maladie est omniprésente chez Friedrich Nietzsche. Celui qui entendait diagnostiquer les maux du temps présent, ne cessant d’emprunter au vocabulaire de la santé (« fracture », « sclérose », « pathologie »…), y opposait notamment une philosophie de la « grande santé ». Une façon de dire que, pour lui, les enjeux spirituels et corporels sont indissociables. Fortement inspiré par cette œuvre, Michel Foucault fera une analyse plus spécifique de rapports de force et de systèmes de domination, jugés inhérents à l’expansion des politiques de santé publique depuis l’ère moderne. La mainmise du pouvoir sur les corps – à travers des dispositifs tels que les hôpitaux, les assurances ou encore les politiques de vaccination – atteste d’un souci proclamé de la vie, néanmoins susceptible d’imposer une norme et, à travers elle, certaines formes de domination. Sa critique de l’assimilation de simples facteurs de risque à de réelles pathologies, par exemple, fait encore aujourd’hui écho au thème de la surmédicalisation.