Après la mort de Joseph Staline, un ancien maître d'école, Alexandre Soljenitsyne, rédige un roman, Une journée dans la vie d'Ivan Denissovitch, véritable brûlot dénonçant les goulags et première étape d'une contestation qui va gagner en ampleur. Serge Moscovici avait consacré une conférence, intitulée « La dissidence d'un seul », à cet homme qu'il voyait comme une « personne historique considérable, exemplaire, et minorité active au sens strict du mot » (le texte est présenté en appendice).
Qu'est-ce qu'une minorité active ?
Le célèbre psychosociologue a retracé l'action de Soljenitsyne, et les réactions qu'elle provoqua chez la majorité (la rédaction de la revue Novy Mir, qui le publiait mais qui tentait de trouver avec lui des compromis, et le Parti, qui réussira à l'exclure en le poussant à l'exil). Mais qu'est-ce qu'une minorité active ? Tout d'abord, minorité active et déviance ne doivent pas être assimilées. Le déviant se définit par rapport au groupe majoritaire : qu'il transgresse, qu'il se mette à l'écart ou qu'il conteste, c'est toujours à l'intérieur du cadre posé par la majorité. La minorité active, elle, « possède ses propres positions, son cadre, ses visées qu'elle propose comme une solution de rechange ».