Quand la mer se déplace

Environ 5 000 miles nautiques séparent l'extrême pointe des Philippines des îles Tuamotu, situées en plein coeur du Pacifique. Le long de cet axe s'étalent des milliers d'îles, dont le quasi continent de la Nouvelle-Guinée, les archipels mélanésiens (Salomon, Nouvelles-Hébrides, Nouvelle-Calédonie, Fidji, Tonga), la poussière d'îles micronésiennes (Mariannes, Carolines, Marshall...), puis celles, encore plus dispersées, de la Polynésie (îles Gilbert, Tonga, Samoa, Cook...). Hawaii, au nord, et l'île de Pâques, située bien plus à l'est, forment les limites extrêmes d'un immense espace marin qui, environ 3 000 avant J.-C., commença à être peuplé par un peuple navigateur venu d'Asie méridionale parlant une langue austronésienne.

Comment sont-ils parvenus - en plus d'un millier d'années il est vrai - à parcourir d'aussi vastes distances océaniques, surmontant le problème de la navigation en haute mer ? Nul ne le sait exactement aujourd'hui, et il est certain que dans sa phase première, ce mouvement comportait une forte part d'incertitude. Ce que l'on sait en revanche, c'est que bon nombre des sociétés sans écriture qui peuplent ces îles - en particulier les plus petites - avaient développé, bien avant l'arrivée du capitaine Cook et autres conquérants européens, un art consommé de la navigation, qui leur permettait d'entretenir de nombreux échanges marchands ou guerriers entre terres lointaines.