École Montessori, un effet de mode ?
Plus d’un siècle après les premiers travaux de Maria Montessori, le label a envahi les magasins de jouets et les librairies. L’offre scolaire inspirée de cette pédagogie est elle aussi en plein essor : en 2017, elle représentait 28 % des établissements privés hors contrat nouvellement créés 1. Le best-seller de Céline Alvarez, Les Lois naturelles de l’enfant (2016), a contribué à cette tendance. L’auteure, enseignante, y relate trois années d’expérimentation Montessori dans une école maternelle en zone prioritaire. Les résultats qu’elle revendique sont spectaculaires : enfants lecteurs dès la petite section, en avance de plusieurs années scolaires en mathématiques et en français. Aurait-on découvert la panacée pédagogique ? Pour Édouard Gentaz, professeur de psychologie du développement à l’université de Genève, nous en sommes loin : « Dans son livre, Céline Alvarez présente davantage une expérience de pédagogue qu’une démonstration scientifique. Son expérimentation porte sur un trop petit nombre d’enfants, et elle n’a pas constitué de groupe témoin. » Si les rares recherches scientifiques menées sur la pédagogie Montessori aboutissent à des résultats encourageants – amélioration des comportements socioémotionnels, développement des compétences académiques et du potentiel créatif des élèves –, leur reproductibilité reste faible 2. Notamment en cause, la difficulté de s’affranchir de l’effet placebo dont bénéficient les enfants chaque fois que parents et enseignants s’engagent dans un dispositif auquel ils « croient ». Les scientifiques peinent à identifier quels éléments de la pédagogie Montessori gagneraient à être diffusés. L’absence de notes ? Le faible ratio élèves-enseignant ? La dynamique inhérente aux classes multiâges ? Le matériel pédagogique axé sur l’éveil sensoriel ? Pour É. Gentaz, il pourrait s’agir d’un effet cocktail, requérant l’ensemble de ces composantes. Une conclusion encore trop fragile pour bouleverser l’école française.