À quoi aurait pu ressembler un monde sans pétrole ?
Sans pétrole ou sans énergies fossiles ? Ce n’est pas la même chose. Avant le pétrole, il y a eu le charbon et les machines à vapeur. Sans pétrole, il y aurait assurément eu beaucoup moins de transports, et particulièrement dans les airs… Mais le pétrole et ses dérivés, c’est surtout la pétrochimie et de nombreux matériaux, comme le bitume des routes, des parkings et des voiries, qui occupe 4 % des sols de l’Hexagone.
Le pétrole, n’est-ce pas surtout la capacité de transformer la matière ? Le béton, le verre, les métaux et le plastique : tout en dépend actuellement.
En effet, cette dualité énergie-matière est majeure, elle a produit ce que j’appelle « l’architecture fossile », et parfois avec démesure : tours de très grande hauteur, architectures hors d’échelle comme le projet saoudien « The Line ». Historiquement, l’impact des énergies fossiles s’est traduit aussi par une nouvelle géographie de l’approvisionnement. À Paris, en 1800, le bois représentait la quasi-totalité de la consommation d’énergie : il était extrait à 200 km en moyenne et acheminé par voie d’eau 1. En 1870, le charbon assurait 58 % des besoins. En 1965, le pétrole devient prédominant avec une distance moyenne d’acheminement de près de 3 000 km. L’ère du pétrole, c’est donc un double mouvement : une extraction exponentielle et une logistique globalisée.