Redevenir sauvage ou le monde rêvé du chasseur-cueilleur

Face à la crise climatico-environnementale, certains rêvent de retour à la nature. Entre stages de jeûne et apprentissage de la cueillette alimentaire, s’esquissent des désirs de monde nouveau.

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L’utopie sauvage correspond à un ensemble de pratiques contemporaines qui visent à renouer avec la nature. Ce désir d’une vie plus authentique, plus sobre et minimaliste n’est pas nouveau. Le regain d’intérêt pour des récits d’expérience comme celui du philosophe Henry Thoreau ainsi que les succès éditoriaux de « nature writing » attestent de ce désir d’ensauvagement des corps et des esprits. Un phénomène social intimement connecté au contexte dramatique de la crise climatique et de l’effondrement de la biodiversité. La radicalité de la situation pousse certains d’entre nous à envisager de nouvelles manières de vivre.

La vie du chasseur-cueilleur, marchant d’un pas léger sur Terre et en harmonie totale avec son environnement, correspond à un nouvel idéal, un modèle inspirant. La paléoanthropologie intéresse de nouveau le grand public et le succès mondial récent des ouvrages de James Scott et de Yuval Harari atteste du dynamisme contemporain de la promesse du chasseur-cueilleur. Confrontés à un avenir incertain et alors que pour la première fois dans notre histoire est évoquée la possibilité d’une disparition de l’espèce humaine, certains sont tentés d’aller puiser dans notre passé pour mieux déconstruire l’idée de progrès.

Nous avons fait le choix d’analyser des pratiques d’ensauvagement qui pourraient être qualifiées de récréatives, au sens où celles et ceux qui s’y exercent n’ont pas forcément pour ambition de changer radicalement de vie et de s’engager dans l’autonomisme. En s’offrant un stage de cueillette de plantes sauvages ou de jeûne, ces derniers s’immergent dans ce que le sociologue Hartmut Rosa qualifie « d’oasis de décélération ». Une parenthèse pendant laquelle ils vont avoir l’opportunité de se réapproprier leur corps et certains savoirs, d’utiliser différemment leurs sens, de découvrir de nouvelles sensations.