Il est bien difficile de définir de manière objective ce qu’est une émotion. Bien sûr, nous, êtres humains, en avons une impression subjective très claire. Nous savons, par expérience personnelle et intérieure, quand nous sommes joyeux, tristes, anxieux, perturbés, en colère… Mais on voit tout de suite que ces impressions subjectives ne peuvent pas être généralisées si l’on s’adresse à des machines programmées pour dire, de manière automatique, par des mots prononcés vocalement ou par des écrits : « Je suis ému ; je suis heureux ; je suis déprimé… ». On conçoit bien que, sauf à s’adresser à des robots très complexes (un point sur lequel nous reviendrons), qui se comporteraient alors comme des êtres vivants, une machine qui répète seulement des mots ne peut pas, a priori, éprouver des émotions.
Le royaume des émotions paraît donc celui de la subjectivité pure. Seules nos propres émotions, à nous sujets humains, nous sont vraiment connues. Mais alors qu’est-ce qui peut nous faire penser que, contrairement à des machines enregistreuses, nos semblables humains comme nos cousins animaux peuvent aussi éprouver des émotions ? Il y a plusieurs réponses à cela : la similitude du comportement avec le nôtre, mais aussi la conviction que ces êtres disposent d’une conscience, qu’ils ont donc un vécu intérieur comme nous, bien différent de celui des machines à parler. En outre, en ce qui concerne les animaux, on peut s’appuyer de plus en plus sur le fait que les ressemblances de comportement reposent aussi sur des ressemblances anatomiques : puisque certains animaux possèdent les mêmes structures cérébrales que nous et que l’on sait que certaines de ces structures supportent les émotions, force est d’admettre que les émotions des animaux (autres que l’Homme !) ressemblent aux nôtres.
Diversité des émotions et structures cérébrales
Signalons d’abord que si les émotions sont variées, on peut les regrouper en deux grands ensembles : les émotions positives et les émotions négatives. Sont positives les émotions qui apportent du plaisir au sujet, comme la joie, le bien-être, l’empathie, l’affection ou l’amour. Sont négatives celles qui apportent du déplaisir comme la peur, l’anxiété, la haine ou la colère.
Chez les vertébrés, on connaît le siège principal des émotions. Il s’agit d’un ensemble particulier de noyaux de l’encéphale, qu’on appelle le « système limbique », et qui comprend notamment les noyaux de l’amygdale et ceux de l’hippocampe. Ces derniers noyaux, qui représentent un cortex cérébral ancien, permettent le lien entre le système limbique, responsable des émotions, et le cortex cérébral, responsable de la cognition et de la conscience. À cette action centrale, il faut aussi, selon les émotions, rattacher des signes végétatifs comme la modification de la pression sanguine, du rythme cardiaque ou de la ventilation pulmonaire, ainsi que des augmentations de la sécrétion de certaines molécules, comme la cortisone sanguine, en cas d’émotion stressante, ou encore les morphines du cerveau, en cas d’émotion agréable.